Stratégie de gestion des documents numériques
Sous l’influence de différents facteurs économiques ou industriels de nombreuses entreprises ont lancé des projets de dématérialisation des processus. La législation a elle même évolué pour accepter progressivement l’existence des documents numériques. Les utilisateurs sont de plus en plus sensibilisés à la transmission numérique.
Et pourtant, dans de nombreux cas, le papier reste encore le mode d’utilisation ou d’archivage de référence. Pour quoi ?
Il y a plusieurs constats. D’un coté les utilisateurs, les clients finaux. Ils sont souvent oubliés dans la conception des projets et sont livrés à eux même pour recevoir et gérer leurs documents. Des outils leurs sont rarement destinés pour gérer, dans la durée, les documents fournis. Ils ne tirent aucun profit du format numérique des documents. Il n’y a pas d’intégration, pas de gestion automatique, pas d’archivage, pas d’alertes lorsque des délais sont à respecter, …
De nombreux utilisateurs décident donc tout simplement d’imprimer et archiver le format papier.
Au sein des entreprises, qui ont maintenant une expérience de plusieurs dizaines d’années de mise en œuvre de systèmes d’information, la relation avec l’extérieur est encore souvent liée à des échanges papier : signatures, preuves, contrats, factures, cartes de visite, …
L’automatisation complète de certains processus est pourtant porteuse de gains d’efficacité importants. Mais elle nécessite une refonte globale en intégrant des informations qui étaient gérés hors système lors des versions précédentes : par exemple toutes les contraintes légales de conservation des documents.
Comme les projets sont souvent faits par étapes, ces contraintes n’ont pas toujours été intégrées lors des premières phases.
Une étude commanditée par Iron Mountain montre que très souvent les entreprises font des choix prudents (tout archiver en double) ou non (pas de trace des messages électroniques).
La bonne démarche consiste à définir préalablement la stratégie de transition, processus par processus, identifier pour chacun toutes les contraintes internes et externes (l’environnement législatif est en particulier délicat) et mettre en place des outils d’automatisation souples, susceptibles d’évoluer avec les besoins.
Prenons un exemple dans la vente de services, qui peut être entièrement dématérialisée (banque ou assurance). Il y a trois acteurs principaux : le client (institutionnel ou particulier), le fournisseur, l’intermédiaire financier.
Première étape, la souscription et l’établissement du contrat. Bien que la législation a favorablement évolué et que la souscription automatique soit souvent possible, elle est systématiquement doublée d’un document papier signé, accompagné de photocopies d’originaux divers. C’est un premier obstacle important à l’automatisation du processus. C’est un facteur de rejet pour le client. Pour le fournisseur, cela nécessite un suivi décalé difficile, avec nécessité de relances et abandon éventuel du contrat. Enfin, en termes de productivité c’est un facteur de risques d’erreurs et de couts. Quelque soit la forme des documents établissant le contrat, des garanties légales sont à respecter pour sa prise d’effet, sa résiliation, et sa conservation. Elles sont relativement faciles à intégrer dans le système d’information du fournisseur qui a conçu sa solution. Elles peuvent être bien intégrées dans le système du client lorsque les échanges sont automatisés. Elles ne sont pas du tout traitées pour les clients particuliers.
Deuxième échange, les flux financiers, faisant intervenir un intermédiaire. Les solutions techniques d’échange électronique d’argent sont nombreuses et très utilisées dans le e-commerce. Elles peuvent être adaptées pour les clients particuliers. Pour les clients institutionnels, il y a aussi des solutions de transfert, moins couteuses. Le transfert d’argent et la facturation sont sans doute les domaines ou la dématérialisation a pris de l’avance sur la législation. Les systèmes d’information en place dans les entreprises sont bien adaptés. Le client particulier est encore une fois délaissé. Rien ne lui permet de gérer ses factures ou ses relevés bancaires. Pire encore, certains documents ne lui sont pas envoyés, c’est à lui de les télécharger par des opérations fastidieuses. Les durées de mise à disposition de ces documents peuvent être ridiculement courtes (de l’ordre du mois dans les banques).
Enfin, le suivi courant du service (information sur l’état de son compte, déclarations de sinistre dans le cas d’une assurance). C’est pendant la vie du contrat qu’intervient le plus grand nombre d’échanges et qu’il est important de trier les informations et archiver ce qui est important. C’est à ce niveau que le processus dématérialisés actuellement mis en place sont les plus décevants : ils reproduisent dans le meilleur des cas le fonctionnement du courrier. Les documents ne sont plus imprimés, mais transmis au même format sous forme de message ou téléchargés. Cependant, force est de constater que la ou le courrier papier atteint des limites physiques et qu’une personne traite son courrier, ou bien (en entreprise) met en place une organisation capable de le faire, concernant les messages électroniques il n’y a pas de limite. Par conséquent la plupart des gens sont débordés par le nombre de messages reçus et ne les traitent pas. Des informations importantes peuvent donc se trouver noyées dans le flot des messages.
Quels enseignements peut-on tirer de cet exemple :
- Il y a sans doute une meilleure façon de faire une “bonne dématérialisation”. Sur chaque étape identifiée, des points peuvent être améliorés. Ils semblent mineurs au premier regard mais ont un impact important sur l’organisation.
- Établir une “identité numérique” permettant d’automatiser la souscription. L’élimination des documents papier lors de la souscription est possible. Elle passe par une plus grande cohérence des bases clients pour identifier chaque client de manière unique.
- Concevoir le processus de bout en bout, ce qui traverse les structures fournisseur – intermédiaire – client en pensant au rôle de chacun. Lorsque la structure est équipée d’un système d’information il faut l’intégrer, sinon il faut proposer des fonctions apportant de la valeur.
- Se concentrer sur son métier. Chaque entreprise ne peut pas devenir un spécialiste de la dématérialisation des flux ou du cloud computing. Elle doit délivrer une forte valeur ajoutée pour ses services. De bons partenariats avec des acteurs reconnus peuvent permettre aussi bien de proposer de bonnes fonctions, que de s’associer dans un panel de services susceptible d’attirer les clients.